Robert Parker a rendu publiques il y a quelques jours ses notes de dégustation sur les primeurs 2010. Le célèbre critique américain profite toujours de cette occasion pour faire partager à ses lecteurs son appréciation du marché, de la demande, de la situation économique. Et, cette année, il n’hésite pas à émettre quelques inquiétudes concernant le prix des vins.
Robert Parker n’est pas seulement l’homme qui fait et défait le prix d’un vin à coup de notes. Ce dégustateur qui arpente (entre autres) le vignoble bordelais depuis 30 ans est aussi un observateur avisé du marché. Chaque année, nous attendons avec autant d’impatience la diffusion de son palmarès de dégustation que celle de son analyse sur le millésime et les faits majeurs susceptibles d’influencer la campagne primeurs.
Le dégustateur dresse un tableau élogieux de la qualité des vins du millésime 2010, par analogie avec les 2005, ils se révèlent pour la plupart immensément concentrés, somptueux, quoique légèrement plus austères et moins précoces que les 2009.
On notera tout de même que les vins très bien notés par le dégustateur sont plutôt moins nombreux qu’en 2009.
Avec une note de 98-100, six crus seulement tutoient les sommets.
Il s’agit – et ce n’est pas un scoop – des châteaux Lafite Rothschild (qui n’avait pas réellement besoin de ce coup de pouce pour se placer, cette année encore, en tête des crus les plus recherchés de Bordeaux), Latour, Haut Brion, La Mission Haut Brion, Pétrus et Ausone.
Une mention spéciale, tout de même pour les crus à qui Robert Parker attribue une note élevée, mais d’une ampleur un peu plus importante : Mouton Rothschild (97-100/100), L’Eglise Clinet, Pontet Canet et Beauséjour Duffau Lagarosse (96-100/100).
Sans surprise, Robert Parker souligne l’appétit du marché chinois pour la catégorie la plus prestigieuse des grands crus classés et assimilés.
Cette demande, conjuguée à l’intérêt croissant des fonds anglo-saxons de placement sur le vin pour les grands crus, devrait contribuer à justifier des niveaux de prix élevés.
Parker se fait écho de la rumeur persistante à Bordeaux d’une hausse prévisible de 15 à 20% des prix, par rapport aux 2009. Rien de bien nouveau dans tout ça.
En revanche, ce qui est plus frappant, c’est le paragraphe qu’il consacre à l’éventualité d’une manipulation du prix des vins.
Le critique américain jette un pavé dans la mare en soulignant qu’aucune source ne permet de connaître précisément le volume de Bordeaux 2009 écoulé lors de la campagne primeurs l’année dernière.
Les acheteurs asiatiques ont-ils été aussi avides qu’on le prétend ?
Robert Parker insinue que le groupe des « Big Eight » (les premiers crus classés du Médoc, Château Haut Brion ainsi que le trio officieux des « 1ers crus classés » de la rive droite que sont Pétrus, Cheval Blanc et Ausone) aurait volontairement retenu une quantité significative de vin pour créer une rareté fictive, et profiter de la hausse des prix qui pourrait en découler.
Info ou intox ?
Seul l’avenir et le marché pourront en attester. En tout état de cause, Robert Parker recommande aux amateurs motivés par l’achat en primeur de se tourner vers des marchands de bonne réputation, pouvant justifier d’un savoir-faire historique en matière d’achat et de livraison des primeurs bordelais.
Affaire à suivre.
Texte et photo IDEALWINE (http://www.idealwine.net/blog/).